
Jean-Paul Baille – Directeur Pôle
En quoi consiste précisément le Manufacturing Engineering dans l’aéronautique ?
J-P.B. On peut comparer le Manufacturing Engineering à l’élaboration d’une recette dans un grand restaurant : le bureau d’études joue le rôle du chef qui imagine le plat (étape de conception), tandis que nous sommes chargés d’écrire la recette détaillée pour que le plat soit réalisable en cuisine (étape de production). Concrètement, à partir des plans fournis par le bureau d’étude, nous définissons les solutions de fabrication et d’assemblage adaptées à chaque pièce, et nous assurons le support technique tout au long de la production.
La fabrication additive est l’un des leviers clés du Manufactu- ring Engineering. Quels sont ses avantages ?
J-P.B. La fabrication additive permet de transformer rapidement un plan de conception en pièce réelle, sans recourir à des procédés complexes ou coûteux. Contrairement aux méthodes traditionnelles, qui enlèvent ou déforment de la matière, la fabrication additive construit la pièce couche par couche à partir de matériaux comme de la poudre, du filament ou de la résine. Elle permet de produire des pièces directement à partir d’un modèle numérique (CAO), sans avoir besoin de moules ou d’outillages spécifiques, souvent très coûteux à concevoir pour de petites quantités. C’est une solution rapide, souple, efficace et économique.
Sur quels types de projets tra- vaillent les équipes de SEGULA ?
J-P.B. Nous intervenons principalement sur des hélicoptères pour Airbus Helicopters, depuis les modèles légers comme l’Écureuil jusqu’au Super Puma, en passant par les appareils intermédiaires (H160, H175, NH90). Nous travaillons aussi bien sur la structure que sur les éléments dynamiques ou les systèmes de transmission vers les hélices. Nos missions couvrent les appareils neufs (Part 21) comme ceux en maintenance (Part 145). Qu’il s’agisse de fabrication ou de remplacement, les compétences mobilisées restent les mêmes : à partir des plans fournis par le bureau d’études, nous vérifions la faisabilité technique. En maintenance, nous intervenons lors des visites périodiques, des grandes visites ou des opérations de retrofit, qui consistent à démonter un hélicoptère complet pour le moderniser.
Quelles sont, selon vous, la valeur ajoutée et les spécificités de SEGULA dans ce domaine ?
J-P.B. L’industrialisation fait partie intégrante de l’ADN de SEGULA, notamment à travers son expertise automobile. Aujourd’hui, nous sommes un acteur majeur du Manufacturing Engineering, avec une présence internationale établie en France, mais aussi au Maroc, en Roumanie, et en Amérique du Nord : ces implantations nous permettent de répondre rapidement à des appels d’offres, et de réduire les coûts. Ce qui nous distingue, c’est avant tout notre offre globale, qui couvre l’ensemble de la chaîne de valeur, du bureau d’études jusqu’à la production. Par ailleurs, nous bénéficions d’une expérience solide avec Airbus Helicopters, un partenaire avec lequel nous collaborons en continu depuis 2006. Cette relation de long terme nous a permis de développer une connaissance fine de leurs processus internes.
Comment est composée l’équipe de Vitrolles, et quels sont les profils recherchés ?
J-P.B. L’équipe réunit à la fois des techniciens et des ingénieurs, principalement issus de formations en génie mécanique ou aéronautique, avec une expertise en conception et fabrication de pièces. Nos activités couvrent des domaines techniques variés comme l’usinage, la tôlerie, l’électricité ou encore la transformation de la matière première. Avoir une bonne compréhension des enjeux logistiques, notamment en matière d’approvisionnement, est important. Aujourd’hui, recruter du personnel qualifié est un vrai défi car les filières techniques ont été longtemps dévalorisées, ce qui a entraîné un désintérêt pour ces métiers de la part des jeunes générations. C’est pour cette raison que nous proposons une politique de formation permettant de faire monter nos collaborateurs en compétences.
À quels outils numériques avez-vous recours ?
J-P.B. Nous utilisons des ERP (Enterprise Resource Planning, ou progiciels de gestion intégrés en français) comme SAP, pour centraliser et gérer l’ensemble des données techniques, logistiques et de production. Ces bases de données nous permettent de suivre chaque étape du processus de fabrication avec précision. Par ailleurs, les logiciels de Conception Assistée par Ordinateur (CAO), depuis CATIA V5, aux dernières itérations de 3D Experience, orientées vers le MBSE (Model-Based System Engineering) qui aujourd’hui font partie du quotidien de nos ingénieurs, nous permettent de concevoir, visualiser et adapter les pièces avant même leur fabrication. Ces outils numériques sont devenus indispensables pour gagner en efficacité, en fiabilité et en réactivité.